La Vie /ESOPE ____________________________________33 co leur Maiftre, mats quils te reverent aujfi, comnie leur bien-faiteur. N'aye point de honte de viei/iir, en apprenant toufiours de jveilleures chofes. Ne dkouvre '-point ton fecret a ta femme, &fcache (tu'elle efpiera fans fin Foccafion de te pouvoir maiftrifer. Amajfe tons les jours quelque chofe pour le lendemain^ car il vaut beaucoup mieux niourir, &* laiffer du bien a fes ennemis, que vivre & avoir- befoin de fesAmk. Salu'e volontiers ceuxque tu rencontres, is te reprefente we la queue du Chien domie du pain a fon Maiflre. Ne te repens ja-mak deft re homme de bien. Chafe de ta maifon le medifant, <& tien pur certain, quil ne manquera point de rapporter, & tes paroles, & tes affions. Ne fay rien qui te puijfe attrifter, & garde-toy de t'affliger ies accidens qui iadviendront. Rejette un mauvais Confeil, <& ne fuis point la faqon de vivre des mechans. Voila quelies furent les Infractions d'Efope a Ennus fon Fils adoptif, qui le toucherent (I avant dans Tame, qu'eftant frapp comme d'une fleche, tant par la remonftrance d'Efope, que par le remors de fa conscience, il en mourut quelques jours apres. Apres qu'Efope euft fait venir a Coy tous les Oyfeleurs duPays, il leur commanda qu'ils eufTent a luyapporter quatre Pouilins d'Aigle. Les ayant eus, il les noucrit a fa mode, & les drefla d'une etrange forte 5 a quoy toutesfois nous n'adjoutons pas beau-coup de foy. Car il leur apprit en volant bien haut, a porter dans des corbeilles certains Enfans pendus a leur col 5 & les i'qeut fi bien accoutumer a leur obeyr, que ces Enfans les faifoient voler ou bon leur fembloit 5 c'eft a dire auiii haut, ou aufli bas qu'ils vou-loient. L'Hyver eftant done paffe, environ le commencement du Prin-temps, il apprefta tout cequ'il jugea neceflaire pour un tel voyage, principalement les Aigles, & les Enfans, avec lefquels il s'en alia en Egypte, ou tous ceux du pays furent fi etonnez des marveilles qu'il leur fit voir, qu'ils ne f^avoient qu'en penfer. Cependant le Roy des Egyptiens ne f^eut pas pluftoft Tarrivee de cet Homme extraordinaire, que fe toiirnant vers quelques-uns de fes Amis: Je ji|is tromp6, leur dit-il, car j'avois ouy dire qu'Efope eftoit mort, i que toutesfois il /bit icy plein de vie. Le lendemain Nedie- (ainfi fe nommoit le Roy) commanda que fes Confeillers a fe veftir de robbes blanches, & pour luy il en prit une rouge, fe mettant fur la tefte une couronne de pierrerie. En cet jpage5 s'eflant affis en fon Throne, il fit appeller E/bpe, qui a peine entre, qu'il luy demanda tout haut: A qui me compares-lJ Efope, &> ceux qui fo?it avec moy ? Au Soleil du Printemps, repon-"jtEfope, <& tes Confeillers aux Effics meurs. Cette reponfe donna "e 1 admiration au Roy, qui luy offrit de grands dons. Le jour K d'apr^s