De FArondelle & des autres Oyfeaux. FABLE XVIII. AU temps que Ton commengoit a femer le linJ'Arondelle vou-lut confeiller aux autres Oyfeaux d'empefcher la femaille, difant qu'on leur avoit dreff6 des embufches 3 mais ils fe gaufle-rent d'elle, & luy dirent qu'elle eftoit une fotte Devinereffe. Depuis quand le lin fut fur le point de fortir de terre 6c de reverdri, elle les advifa derechef d'en arracher la femence 3 mais ils ne firent encore que s'en mocquer. A la fin comme elle vid gu'il commengoit a meurir, elle leur donna confeil de s'en aller piller les bleds 3 ce qu'ils ne voulurent faire, non plus que le refte. Alois l'Arondelle quittant la compagnie de tous les autres Oyieaux,rechercha celle de F Homme avec qui elle fait amitie^ d'oii vient qu'elle demeure maintenant avec luy & le rejoiiit de fon chant, au lieu que luy-mefme chafTe les autres, & fe fert du lin pour faire des rets <5c des lacets a les prendre. DISCOURS MORAL. C'Eft un grand malheur a ceux qui ne veulent point fuivre, le confeil des fages: Cela fe voit prefque tous les jours dans les concurrences humaines, ou la jeunefle meprife les enfeignemens des Viellards, & fe precipite inconfiderement en mille fortes de perils, caufez par fon increduiite. Outre le mal qui arrive de ne pas croire un bon amy cjui nous confeille fidellernent, on perd prefque tou-jours fon amitie, car fe voyant rebut6, il nous abandonne, ne pou-vant foufFrir d'eftre tenu pour fufpect en fa veritable arleclion. Ce qu'Efope a fort judicieufement remarqu^ en l'Arondelle quife retira d' avec les autres Oifeaux a caufe qu'ils avoient meprife les fages enfeignemens qu'elle leur avoit donnez. Heureux font ceux qui fervent profiter des bons confeils qu'on leur donne. FAB. XVIII'